[BG] Teranya Tíntallë

« Teranya ! Par ici ! »

Le jeune humain se retourne, lance un regard à son amie et s’élance à grandes enjambées sur le tapis orangé de feuilles d’automne, au pied des arbres.
Elle, le suit, riant de bon cœur, insouciante et heureuse. Le vent siffle à ses oreilles tandis qu’elle tente vainement de rattraper son compagnon. L’écart ne diminue que lorsque celui-ci s’arrête pour la narguer, espiègle. Quelque part devant eux se fait entendre le murmure d’une rivière. Le rire de Tilian a cessé. Teranya n’entend plus non plus le bruit de ses pieds sur les feuilles. Elle arrive enfin à la lisière de la forêt, et se retourne, méfiante, songeant que son ami s’est caché derrière un arbre, prêt à lui bondir dessus. Le bruissement de l’eau est plus proche désormais. La rivière doit être juste derrière cette butte. Elle se remet à courir, gracieusement. Elle grimpe, s’aidant de ses mains. Au sommet, Teranya le voit, assis sur un rocher, au milieu du cours d’eau. Il lui sourit, elle aussi.

Tilian. Son ami de toujours. Ils ont été élevés ensemble, à Akarios. Enfants de deux familles très proches, ils ont toujours été là, l’un pour l’autre. Partenaires de jeux et de farces, mais de caractères et d’opinions différents. Il a grandi avec l’assurance de devenir un grand archer, pour lutter contre les forces Asmodiennes. Elle par contre, ne se soucis guère des conflits d’Atréia. Son désir est de vivre ici, profiter de la paix de la forêt de Daminu et de ce qu’elle renferme. La nature. Sa raison de vivre. Les animaux, mais surtout les plantes. La jeune humaine a choisi d’être alchimiste, passionnée par les talents de son père, qui habite désormais Sanctum avec sa mère. Depuis, elle excelle dans cette branche. Elève d’Aerios lui-même, un grand sage du Lyceum, c’est elle qu’il préfère, bien que celle-ci l’ignore. Il lui a tout appris, ou presque. La façon de trouver les plantes médicinales, la méthode pour les cueillir sans les abîmer, l’art de les utiliser pour en faire des potions miraculeuses. Quoiqu’il en soit, Tilian et elle ont toujours été comme un frère et une sœur ensemble, malgré ces divergences. Ils s’adaptaient, simplement. Curieux de tout, il l’accompagnait lors de voyages, à la recherche de variétés d’herbes. De son côté, Teranya se sentait en sécurité avec lui, au milieu de régions parfois dangereuses, bien qu’elle ait appris les rudiments de la magie des éléments et de l'ether.

Il l’attend, l’arc posé à ses côtés, le carquois sur le dos, en diagonale.

« Dépêche-toi de descendre ! Je veux te montrer un endroit que j’ai découvert avant-hier ».

Teranya s’exécute prudemment, ne voulant pas dégringoler de la colline et se retrouver dans l’eau.

« -Tu sais que je ne peux pas sauter aussi loin que toi ! lui rappelle-t-elle, au bord de la rivière.
- Ne t’inquiète pas, je vais te rattraper ».

Prenant son élan, elle s’élance par dessus l’eau et atterrit sur Tilian, qui s’effondre sous son poids, bien que léger. Les deux éclatent de rire, allongés sur le rocher. Il se redresse et lui tend rapidement la main pour l’aider à se relever. Lentement, ils passent de pierre en pierre jusqu’à atteindre l’autre côté du cours d’eau. En marchant, ils arrivent à présent tout prêt d’une falaise d’une dizaine de mètre de haut. A son pied s’ouvre un passage béant, sombre. Curieuse, Teranya suit l’homme jusqu’à l’entrée.
Tandis qu’ils scrutent l’obscurité de la grotte, un courant d’air bruyant et nauséabond sort de l’intérieur. Puis un cri effrayant.

« Tilian ! Partons ! Cet endroit ne m’inspire guère confiance, s’il te plaît, viens » le supplie-t-elle, prenant sa main pour le forcer à quitter les lieux.
- Mais non, ne t’inquiète pas, c’est juste le vent, il n’y a rien…et puis, si ca te rassure… ».

Il tend le bras vers l’arrière et prend une flèche dans son carquois. Rapidement, il bande à moitié son arc, et le tenant vers le sol, pénètre dans la grotte. Quelque peu effrayée, Teranya sort de son sac une fiole lumineuse. Puis elle lui emboîte le pas.
Avec prudence, les deux humains avancent. Doucement. Teranya remarque que malgré son visage paisible d’apparence, Tilian n’a pas l’air très rassuré. Soudain, une deuxième rafale de vent jaillit des entrailles de la grotte et manque de les faire tomber. Teranya laisse échapper la fiole de sa main, qui se brise par terre. Après avoir un instant éclairé les parois d’une faible lueur, l’obscurité l’étouffe, comme une luciole mourante.

Un hurlement strident emplit l’espace. Teranya, aveugle dans le noir, perçoit des mouvements, des présences glaciales. Elle ressent un malaise : quelque chose d’affreusement froid semble pénétrer dans sa jambe. Elle la lève immédiatement, et est prise de panique.

« Tilian, partons, je t’en prie ! ».

Aucune réponse ne parvient à ses oreilles. Une fois encore, elle sent cette emprise gelée lui saisir le talon. Elle murmure une prière à Aion, mais à ce moment précis, entend son compagnon lui crier, au loin dans la caverne :

« Teranyaaaaaa ! Fuis ! ».

Des voix d’outre-tombe volent autour de la jeune humaine, affolée. Cherchant à tâtons la sortie, s’aidant des parois humides, elle tente de s’échapper. Après un moment qui lui paraît une éternité, elle entrevoit enfin la sortie. Ne parvenant pas à comprendre, elle court sans s’arrêter jusqu’au village, à travers rivière et forêt, et s’effondre en arrivant.








« Teranya…Teranya ! ».

Une voix l’appelle, au plus profond de sa tête.

« Teranya ! »

Elle ouvre les yeux. C’est Aerios. Elle se souvient instantanément de ce qui s’est passé. La caverne, le vent, les voix, le froid…et Tilian.

« Tilian ! Il a été capturé !
- Comment ? Par qui ? Où ? répond le grand sage, calmement mais fermement ».

Elle lui explique rapidement la triste aventure, puis l’obscurité envahit à nouveau son esprit.






Longtemps après, la chaleur du soleil sur sa joue la réveille. Teranya entend des voix, dans la pièce d’à côté. Elle jette un œil autour d’elle et se rend compte qu’elle est dans la chambre de guérison d’Akarios. Elle se lève, et se fraye un chemin entre les gens, tous tournés dans la même direction. Ils regardent vers le bas. Elle aperçoit des draps blancs. S’approchant davantage, la jeune humaine le voit. Elle se fige. Tilian est là. Mort.

Aerios se redresse, alors agenouillé près du corps. Il se dirige vers son élève et pose sa main sur son épaule, amicalement. Puis il lui dit à voix basse :

« Il a eu de la chance, une ch…
- Comment ? l’interrompt-elle. Comment cela, de la chance ? Il est mort !
- Son teint est livide, mais il ne nous a pas quitté, pas pour le moment. Ton ami est vivant, mais je ne peux le garantir encore longtemps ».

Après un soupir, il explique :

« Immédiatement après que tu te sois évanouie, j’ai envoyé un groupe de guerriers à l’endroit que tu m’as indiqué. Deux mages se sont joins à eux. C’est la demeure d’anciens spectres, créatures maudites d’un Âge oublié. Après une lutte acharnée, ils ont trouvé Tilian, une lame recourbée dans la poitrine. Ce que je ne m'explique pas, c'est que cette lame est Asmodienne. Teranya…cette lame était empoisonnée. J’ai fais appel à tout mon pouvoir, mais je ne parviens pas à le libérer de cette magie qui m’est inconnue.
- Utilisez mes potions alors ! dit-elle, se retournant pour aller les chercher ».

Aerios la rattrape et d’un ton sévère lui assure :

« Aucune de tes potions ne peut la guérir. Mais je pense avoir trouvé une solution. Dans un ancien grimoire de la Bibliothèque, il est fait mention d’une plante, la « Siliambe ». Il semblerait qu’elle pousse du côté du village de Tolbas, près de Verteron, mais je ne sais pas exactement où. Vas-y, toi, et ramène de quoi sauver Tilian ».

C’est ainsi que Teranya quitta son village et se mit en route vers cette cité inconnue.

Mais les fins heureuses ne sont hélas pas monnaie courante dans la réalité, et elle ne trouva pas cette plante. Des mois plus tard, Teranya rentra à Akarios, après avoir reçu une missive d'Aerios, lui annonçant le décès de son ami. Jamais elle ne pu se pardonner d'avoir échoué. Mais, dans son chagrin et sa colère, elle tourna ses pensées vers la vengeance. Elle décida d'apprendre la magie, et de se préparer à combattre. Par conséquent, elle fit tout le nécessaire pour devenir une daeva. Elle retourna à la grotte, des années plus tard, pour achever sa mission, mais les spectres n'y étaient plus. Ne pouvant éteindre la fureur remplissant son esprit, elle se tourna vers ceux qui étaient de près ou de loin liés à la perte de son ami : les Asmodiens. Mais la lutte solitaire ne mènerait à rien. Aussi, elle décida de se mettre à la recherche de ceux qui pourraient l'aider. Cette Légion légendaire et perdue : Les Oubliés.

A la suite d'une longue enquête, elle trouva la position de leur île...et s'y rendit, afin de passer le test d'entrée.